2002-005 Décision

Représentante : Katharine Roney, LRC DOM
Décision No : 100000470005
Type de décision : Appel du droit à pension
Lieu de l'audition : Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard)
Date de la décision : le 5 septembre 2002

 

Suite à une audience d'appel du droit à pension tenue pour l'appelant le 5 septembre 2002, le Tribunal rend la décision suivante :

ORDONNANCE

ARTHROSE DE LA COLONNE LOMBAIRE

FRACTURES BILATÉRALES DU CALCANÉUM ENTRAÎNANT UNE ARTHROSE DES ARTICULATIONS ASTRAGALO-CALCANÉENNES

Ni consécutives ni directement rattachées au service en temps de paix, dans les forces régulières.
paragraphe 21(2), Loi sur les pensions

Copie originale signée par :
_________________________Membre présidant
M.M. Habington

Copie originale signée par:
________________________Membre
Robert Benoît

Copie originale signée par:
________________________Membre
Wm (Bill) Malenfant

QUESTIONS EN LITIGE

Le 5 septembre 2002, un comité d'appel du droit à pension a tenu une audience à Charlottetown (Île-du-Prince-Édouard), car l'appelant était en désaccord avec la décision du comité de révision (examen), en date du 13 juin 2001. Mme Katharine Roney, agente d'entraide de la Légion royale canadienne était sa représentante.

ÉLÉMENTS DE PREUVE

L'agente d'entraide a soumis le document suivant à titre d'élément de preuve:

AD-H1: Lettre du DrCarl Farmer, chirurgien orthopédiste, datée du 13 mai 2002.

Arthrose de la colonne lombaire
Fractures bilatérales du calcanéum entraînant une arthrose des articulations astragalo-calcanéennes

FAITS ET ARGUMENT

L'agente d'entraide a fait valoir, au nom de l'appelant, que les affections alléguées sont directement liées à une chute que l'appelant a faite en février 1956, pendant qu'il servait dans les forces régulières et que, par conséquent, il est admissible à une pension pour les affections alléguées en vertu du paragraphe 21(2) de la Loi sur les pensions.

L'agente d'entraide a informé le Tribunal que ses arguments porteraient simultanément sur les deux affections, qui sont attribuables à la même chute.

L'agente d'entraide a attiré l'attention du Tribunal sur la déclaration du médecin datée du 28 avril 1998 concernant le diagnostic d'arthrose de la colonne lombaire, de même que l'arthrose des articulations astragalo-calcanéennes consécutives aux fractures des talons.

L'agente d'entraide a examiné les preuves concernant la chute faite par l'appelant en 1956. Selon la déclaration de l'appelant versée au dossier, qui a été confirmée par l'appelant lors de l'audience de révision (examen), au moment des événements, l'appelant réintégrait le NCSM Haida, qui était en cale sèche le 5 février 1956, vers 11 h 30. Il tombait une pluie verglaçante à ce moment-là. L'appelant est monté sur la planche d'embarquement et, après avoir atteint un palier, il a glissé et s'est retrouvé sur le pont inférieur après avoir fait une chute d'une hauteur d'environ 20 pieds. La preuve a révélé que l'appelant s'est fracturé les deux talons et qu'il a également subi une fracture de la vertèbre D-12.

Selon la décision du comité de révision (examen) datée du 13 juin 2001, l'appelant n'était pas dans l'exercice de ses fonctions lorsque la chute est survenue, et la demande de pension a été refusée à la lumière des conclusions de la commission d'enquête tenue en février 1956. Ces conclusions sont résumées ci-après :

  1. On a attribué les causes de l'accident, d'une part au plancher glissant de la plate-forme et, d'autre part, au jugement affaibli de l'homme qui avait bu de la bière juste avant que l'accident ne se produise.
  2. L'homme revenait à bord de son bateau après une permission et, par conséquent, on ne peut considérer qu'il était en service au moment où l'accident est survenu.
  3. Il est évident que l'homme n'a pas fait preuve de la prudence requise tandis qu'il était sur l'échelle et, par conséquent, il est partiellement responsable de l'accident.
  4. On ne peut imputer la blessure au service militaire proprement dit...

Le comité de révision (examen) a, en outre, mentionné le fait que l'appelant avait consommé de l'alcool, qu'il était en congé lorsque l'accident est survenu et qu'il ne se trouvait pas sur la propriété ou dans des locaux militaires du ministère de la Défense nationale.

MOTIFS ET CONCLUSION

En arrivant à sa décision, le Tribunal a très attentivement examiné tous les éléments de preuve, les dossiers médicaux ainsi que le plaidoyer de l'agent d'entraide, et il a respecté l'obligation statutaire d'accorder le bénéfice du doute à l'appelant ou au demandeur en vertu des dispositions des articles 3 et 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel).

Le Tribunal a examiné les preuves médicales et commentera d'abord l'arthrose de la colonne lombaire alléguée. À la lumière des éléments de preuve, il conclut qu'aucune lésion n'a été causée à la colonne lombaire par suite de la chute subie en 1956. Par conséquent, le Tribunal n'a pu établir un lien entre l'arthrose de la colonne lombaire alléguée et la chute en question.

Le Tribunal note que selon l'opinion du Dr Carl Farmer, présentée sous la pièce AD-H1,la fracture de la vertèbre D-12 liée à la chute subie en 1956 pourrait avoir entraîné l'arthrose à ce niveau de la colonne. La fracture de D-2, cependant, concerne la colonne dorsale; or, aucune demande de pension pour une invalidité touchant la colonne dorsale n'a été présentée auparavant devant le comité d'appel. De plus, le Dr Farmer a établi un lien causal possible entre les douleurs que l'appelant ressent actuellement à la colonne lombaire et la fracture de D-12. Cependant, aucune demande connexe n'a été soumise, non plus, au comité d'appel en vertu du paragraphe 21(5) de la Loi sur les pensions.

Quant aux fractures bilatérales du calcanéum entraînant une arthrose des articulations astragalo-calcanéennes, il n'existe aucune preuve médicale indiquant que l'appelant s'est fracturé les talons à l'automne de 1956. Par conséquent, l'admissibilité à une pension d'invalidité pour cette affection dépend de la question de savoir si la chute en 1956 peut être considérée comme étant consécutive ou rattachée directement au service accompli par l'appelant en temps de paix dans les forces régulières. Le simple fait de servir dans les forces lorsqu'un accident survient ne suffit pas pour établir un lien entre l'accident et le service.

Dans cette affaire, les preuves ont révélé que l'appelant réintégrait son navire, qui était en cale sèche, après un congé. Dans sa déclaration à la commission d'enquête, l'appelant a dit qu'il était allé à la « cantine à STADACONA », où il avait consommé environ dix verres de bière pression. Il a dit qu'il ne se sentait pas éméché pour autant, puisqu'il avait consommé ces verres sur une longue période, soit entre 8 h 30 et 10 h.

Bien que l'appelant ait mentionné n'avoir aucun souvenir de la période qui a suivi son départ de la cantine, il se rappelait néanmoins avoir monté les marches en courant, sans difficulté, « j'ai monté les marches précipitamment, il n'y avait pas de problème ». Ce souvenir a été confirmé par le témoignage de deux camarades de bord, qui ont indiqué que l'appelant avait négocié la passerelle d'embarquement et monté les marches jusqu'au palier supérieur sans difficulté, mais qu'il avait refusé qu'on l'aide à embarquer à bord du navire. Un témoin a dit qu'il est ensuite redescendu jusqu'au niveau du palier inférieur suivant. Ce témoin, qui était sur les lieux lorsque l'appelant a fait sa chute, a témoigné devant la commission d'enquête que l'appelant a dit, alors qu'il se trouvait sur le « palier supérieur », qu'il ne se sentait pas bien et que lorsqu'il a ultérieurement vu l'appelant sur le « deuxième palier », ce dernier se trouvait « à une certaine distance de la rampe, se tordant de douleur ». Le témoin, après avoir entendu l'appelant pousser un cri, s'est rendu auprès de ce dernier et a constaté qu'il « avait fait une chute et s'était retrouvé sur le deuxième palier ».

Le deuxième témoin, qui était en service sur la passerelle, a dit à la commission d'enquête qu'une pluie verglaçante avait rendu les marches glissantes, mais il a confirmé ultérieurement qu'« un abrasif avait été répandu sur les marches ». Ce témoin a également confirmé qu'on avait offert à l'appelant de l'aider à embarquer à bord du navire alors qu'il se trouvait sur le « palier supérieur », mais que celui-ci avait refusé qu'on l'aide. Il n'existe aucune preuve que d'autres personnes étaient tombées ou s'étaient blessées en raison de l'état des marches.

Le Tribunal conclut que l'accident n'est pas survenu durant les heures de travail normales de l'appelant et qu'il est clair que l'appelant était en congé lors de sa chute. Par conséquent, il n'a pu conclure que la chute et toute invalidité subséquente étaient rattachées directement à l'exercice de ses fonctions militaires.

À la lumière des preuves recueillies par la commission d'enquête, le Tribunal n'a pu conclure, non plus, que la chute et toute invalidité subséquente étaient consécutives au service militaire de l'appelant, puisque ce dernier avait consommé plusieurs verres de bière et qu'il a fait preuve de négligence. En l'occurrence, les éléments de preuve disponibles indiquent clairement que sa chute accidentelle est attribuable aux conditions météorologiques, à l'état d'ébriété dans lequel il se trouvait, à son obstination à refuser l'aide offerte pour embarquer à bord du navire et à son omission de prendre les précautions nécessaires, compte tenu de la surface glacée des marches.

Par conséquent, à la lumière des éléments de preuve, le Tribunal ne peut conclure que toute invalidité dont l'appelant est atteint en raison de la chute accidentelle susmentionnée, y compris les fractures bilatérales du calcanéum entraînant une arthrose des articulations astragalo-calcanéennes, est consécutive ou rattachée directement à son service en temps de paix dans la Force régulière.

Le Tribunal confirme la décision du comité de révision de l'admissibilité datée du 13 juin 2001.

DISPOSITIONS PERTINENTES DE LA LOI

Aux termes de l'alinéa 21(2)(a) de la Loi sur les pensions, des pensions sont accordées sur demande aux membres des forces ou à leur égard, en cas d'invalidité causée par une blessure ou maladie ou son aggravation consécutive ou rattachée directement au service militaire accompli dans la milice active non permanente ou dans l'armée de réserve pendant la Seconde Guerre mondiale ou le service militaire en temps de paix.

Aux termes du paragraphe 29(1) de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel), le comité d'appel peut soit confirmer, modifier ou infirmer la décision en appel, soit la renvoyer pour réexamen, complément d'enquête ou nouvelle audition à la personne ou au comité de révision qui l'a rendue, soit encore déférer à cette personne ou à ce comité toute question non examinée par eux.

L'article 25 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) stipule que le demandeur qui n'est pas satisfait de la décision rendue en vertu des articles 21 ou 23 peut en appeler au Tribunal.

L'article 26 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) stipule que le Tribunal a compétence exclusive pour statuer sur tout appel interjeté en vertu de l'article 25, ou sous le régime de la Loi sur les allocations aux anciens combattants ou de toute autre loi fédérale, ainsi que sur toute question connexe.

L'article 3 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) stipule que les dispositions de la présente loi et de toute autre loi fédérale, ainsi que de leurs règlements, qui établissent la compétence du Tribunal ou lui confèrent des pouvoirs et fonctions doivent s'interpréter de façon large, compte tenu des obligations que le peuple et le gouvernement du Canada reconnaissent avoir à l'égard de ceux qui ont si bien servi leur pays et des personnes à leur charge.

L'article 39 de la Loi sur le Tribunal des anciens combattants (révision et appel) stipule que le Tribunal applique, à l'égard du demandeur ou de l'appelant, les règles suivantes en matière de preuve il tire des circonstances et des éléments de preuve qui lui sont présentés les conclusions les plus favorables possible à celui-ci; il accepte tout élément de preuve non contredit que lui présente celui-ci et qui lui semble vraisemblable en l'occurrence; il tranche en sa faveur toute incertitude quant au bien-fondé de la demande.

DÉCISION FAISANT L'OBJET D'UN APPEL

Arthrose de la colonne lombaire
Fractures bilatérales du calcanéum entraînant une arthrose des articulations astragalo-calcanéennes

Ni consécutives ni directement rattachées au service en temps de paix, dans les forces régulières.
paragraphe 21(2), Loi sur les pensions
TACRA Comité de révision (examen), 3 juin 2001

L'appelant a présenté une demande de pension pour les affections à l'étude, en premier lieu, il y a plus de trois ans.